Où il est question aussi beaucoup de formes.......
« Je suis dans le rayon d'une grande surface, l'esprit un peu hagard, s'étalant sous mon regard des dizaines de produits issus de ces mamelles qui assurent l'existence. Reconverti en conditionnement de toutes sortes, l'usage laitier dicte à mes sens d'en choisir à mon bon vouloir, selon la taille, la couleur ou la présentation dont on les a parés.
Si je pouvais j'en ferais à l'expression consacrée tout un fromage. Obligé de constater qu'on me laisse entre un octogénaire insensible à la mode des portions de poche et une lectrice de pourcentages sur les emballages, en l'absence d'une proposition à goûter avant de consommer.
Dans du bois, du carton, du papier, du plastique, des filets, des croûtes épaisses, je ne peux songer à les humer avant de me décider. C'est ainsi au pays de la vache qui rit, il faut s'en remettre aux images.
De ses appétissants contours, ainsi déplacé de sa vitrine réfrigérée à mon intérieur chaleureux, son enveloppe, sa pâte, sa peau, sa chair, je vais les conserver et de même la fraîcheur de l'intuition que c'est un régal qui viendra clôturer le repas, une fois couché dans mon assiette.
Si je ne l'apprécie pas, si malgré moi c'est un hasardeux mariage entre l'artichaut et la part de tarte ? L'odeur qui pourrait jeter un froid dés l'ouverture du frigo, l'impact gustatif d'aller en perdre haleine ou de n'avoir eu en bouche que ses épices, mais rien de sa nature.
Mon affinage me semble pourtant fait de longue date. N'ai-je pas après tout au milieu des apparences succombé sans expérience à l'aspect de mes sens ? Je remonte le temps et ne disait-on pas formage pour fromage ? Formidable ne veut-il pas dire épouvantail ? Morphê ne donne t-il pas naissance à uniforme ? De quel rêves sommes-nous habité-es ? »
« Aussi pourquoi tant de transformations pour nous plaire, tant de performances dans l'essayage des tenues ? Tout tient dans le caractère, il y en a des tendres et des fermes, de la Hollande à la Corse et c'est heureux pour les amoureux. »